Le principe de laïcité peut rendre illégale une décision de préemption
(CAA Versailles, 1er octobre 2020, commune de Montreuil, req. n° 18VE01088).
On sait que l’article L. 210-1 de ce code pose que » les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l’intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l’article L. 300-1 « et que cet article L. 300-1 permet la mise en œuvre d’une dizaine d’objectifs, très largement définis. Il est donc rare qu’une décision de préemption ne puisse pas être rattaché à l’un de ces objectifs.
Toutefois, la Cour administratif d’appel de Versailles a confirmé l’annulation d’une décision du maire de Montreuil au nom d’un principe qui est loin d’être spécifique au droit de l’urbanisme et au droit de préemption, le principe de laïcité. Le maire de la commune avait préempté un bien « en vue de permettre la réalisation d’un équipement collectif d’intérêt général à vocation cultuelle »
La Cour cite le fameux article 2 de la loi du 9 décembre 1905 selon lequel « la République ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte ». Elle en déduit que : « En décidant de préempter la parcelle litigieuse en vue de la laisser de façon exclusive et pérenne à la disposition d’une association principalement pour l’exercice d’un culte, d’ailleurs au prix de 450 000 euros très inférieur au montant de 796 000 euros retenu par l’avis du service des domaines et à la somme de 800 000 euros figurant dans la promesse de vente passée avec l’acquéreur évincé, le maire de la commune de Montreuil a, en l’absence de dérogations légales le prévoyant, décidé une dépense illégale en faveur de l’exercice d’un culte, en méconnaissance des dispositions, mentionnées au point 2, de la loi du 9 décembre 1905 susvisée ». Une décision de préemption n’est donc légale que si son but est légal.
Benoît JORION
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public