Moyens susceptibles d’être soulevés à l’encontre d’une déclaration d’utilité publique en cas de recours contre un arrêté de cessibilité
Il est fréquent qu’un propriétaire ne prenne conscience du risque d’expropriation qui pèse sur lui qu’au moment de l’envoi de l’arrêté de cessibilité qui désigne expressément sa parcelle. Or, cet arrêté de cessibilité ouvre peu de prise au contentieux, en tout cas infiniment moins que la déclaration d’utilité publique.
La jurisprudence a donc depuis longtemps fait application de la théorie des opérations complexes à la matière de l’expropriation, permettant de contester la déclaration d’utilité publique dans le cadre d’un recours dirigé contre un arrêté de cessibilité.
Or, dans le cadre d’une jurisprudence générale de restriction des moyens susceptibles d’être soulevés en matière d’excès de pouvoir, le Conseil d’Etat avait posé qu’en cas d’exception d’illégalité soulevée contre un acte règlementaire à l’appui de l’acte qui en faisait application, les vices de forme et de procédure ne pouvaient être invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’acte réglementaire lui-même (CE, Ass.,18 mai 2018, Fédération des finances et affaires économiques de la CFDT, req. n° 414583, rec. p. 187).
Le Conseil d’Etat n’a pas étendu cette jurisprudence à la matière de l’expropriation. Il a d’abord posé que « l’arrêté de cessibilité, l’acte déclaratif d’utilité publique sur le fondement duquel il a été pris et la ou les prorogations dont cet acte a éventuellement fait l’objet constituent les éléments d’une même opération complexe. Dès lors, à l’appui de conclusions dirigées contre l’arrêté de cessibilité, un requérant peut utilement se prévaloir, par la voie de l’exception, de l’illégalité de l’acte déclaratif d’utilité publique ou de l’acte le prorogeant, quand bien même le requérant aurait vu son recours en excès de pouvoir contre la déclaration d’utilité publique ou l’acte la prorogeant, être rejeté ». Il a ensuite accepté d’examiner des moyens tenant à l’irrégularité alléguée de l’étude d’impact (CE, 4 août 2021, commune de Mitry-Mory, req. n° 429800, mentionné aux tables).
Benoît Jorion
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public