Risque naturel et expropriation
L’article L. 561-1 du code de l’environnement permet d’exproprier un bien exposé à un risque naturel et d’indemniser les propriétaires sans tenir compte de l’existence du risque.
Le Conseil d’Etat a été saisi, non pas d’une expropriation, mais d’un refus d’engager une procédure d’expropriation d’un terrain de camping que son propriétaire estimait soumis à un risque naturel majeur du fait de l’existence d’une cavité souterraine.
Il a estimé que l’autorité administrative n’était pas dans une situation de compétence liée, même en cas de risque avéré, et qu’elle pouvait prendre des mesures de police, évidemment moins favorables financièrement pour le propriétaire : « Il résulte de ces dispositions que, même en présence d’un des risques prévisibles énumérés aux articles L. 561-1 et L. 561-3 du code de l’environnement et menaçant gravement des vies humaines, l’autorité administrative n’est pas tenue de mettre en œuvre les procédures d’expropriation ou d’acquisition amiable prévues par ces articles, notamment lorsqu’une mesure de police administrative est suffisante pour permettre de protéger la population ou éviter son exposition au risque. 5. L’application des dispositions relatives à la police municipale citées au point 3 n’excluent pas que l’exploitant d’une installation dont la fermeture a été ordonnée sur leur fondement pour prévenir les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, soit fondé à demander l’indemnisation du dommage qu’il a subi de ce fait lorsque, excédant les aléas que comporte nécessairement une telle exploitation, il revêt un caractère grave et spécial. 6. Il résulte de ce qui est dit au point 4 qu’en jugeant que le refus de faire application des articles L. 561-1 et L. 561-3 du code de l’environnement n’était pas illégal dès lors que le risque d’effondrement et d’affaissement du terrain dû à une cavité souterraine et menaçant gravement les vies humaines pouvait être évité par des mesures de police de fermeture temporaire ou définitive du camping, que l’autorité administrative pouvait légalement prendre sur le fondement du 5° de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, la cour administrative d’appel n’a pas entaché son arrêt d’une erreur de droit. En estimant que les mesures de police étaient en l’espèce suffisantes pour assurer la prévention du dommage, la cour a porté sur les faits de l’espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation. Enfin, en faisant référence à un arrêté du 3 février 2016 du préfet de la Dordogne fermant définitivement le camping au public, postérieur à la décision attaquée, la cour, qui ne s’est pas fondée sur cette décision, n’a en tout état de cause pas commis d’erreur de droit. » (CE, 4 août 2021, société Le Cro Magnon, req. n° 431287).
Benoît Jorion
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public